Roger T. Pédauque
Présentation de l'auteur
Roger T. Pédauque est un pseudonyme utilisé de mai 2002 à janvier 2007 par un collectif regroupant 170 scientifiques francophones issus de plusieurs laboratoires et travaillant dans des disciplines différentes (informatique, SIC, philosophie, sociologie, etc.).
Ces chercheurs ont travaillé dans le cadre du RTP-Doc (Réseau Thématique Pluridisciplinaire « Document et contenus : création, indexation, navigation »). C'est en mars 2002 1) que quarante RTP ont été crées par le département Sciences et Technologies de l'Information et de la Communication (STIC) du CNRS. Le RTP-Doc a existé à travers une plateforme collaborative sur Internet et par des séminaires, des numéros spéciaux de revues et des textes collaboratifs. Le site web du RTP-Doc était http://rtp-doc.enssib.fr et s'il n'est plus accessible des copies restent encore disponibles sur Internet Archive via l'outil Wayback Machine.
Le principal animateur du RTP-Doc fut Jean Michel Salaün, professeur en science de l'information et de la communication à l'ENS Lyon2), il fut aussi directeur de l’École de bibliothéconomie et des sciences de l’information à l’université de Montréal (EBSI) de 2005 à 20103).
Trois articles ont été publiés entre 2003 et 2006 sur le web, ils ont ensuite été regroupés et enrichit dans la monographie Le document à la lumière du numérique. Puis une seconde monographie est publié en 2007 : La Redocumentarisation du Monde. Il regroupe des rapports sur d'autres activités de Roger et il marque aussi l'arrêt des activités du groupe.
En 2011 un autre collectif d'une dizaine de chercheurs franco-québecois ayant participé au RTP-doc essaye brièvement de relancer les aventures de Roger4), sous un nom légèrement modifié car cela a été fait dans un cadre complètement différent : Roger II Pédauque. Il publie deux versions du texte “Le Web sous tension”, une en 20115) puis une en 20126), malheureusement toutes les deux ont disparues, il ne reste qu'un résumé sur l'ancien blog de Jean Michel Salaün. Enfin, en juin 2012 des “webinaire” (vidéoconférences) ont été réalisées7). Depuis, plus rien n'a été publié… à suivre ?
Autres membres notoires du RTP-Doc
Parmis les principaux participants, on peut distinguer les membres du comité de pilotage en 20058) :
Catherine Garbay (CNRS, département STIC), Nathalie Aussenac (IRIT), Bruno Bachimont (INA), Abdel Belaid (LORIA), Jean-Baptiste Berthelin (LIMSI), Dominique Boullier (UTC), Anne Condamines (ERSS), Stéphane Chaudiron (Ministère de la Recherche), Ghislaine Chartron (INRP), Claude Chrisment, (IRIT), Jean-Pierre Dalbéra (Ministère de la Culture), N. Desnos (CLIPS-IMAG), Jacques Ducloy (INIST), Hubert Emptoz (LIRIS), Christian Fluhr (CEA), Mauro Gaio (LIUPPA), Patrick Gros (IRISA), Andréa Iacovella (MOM CNRS, ENS-lsh), Jacques Labiche (PSI), Philippe Laublet (LaLICC), Christian Licoppe (CNRS), Jacques Madelaine (GREYC), Jean-Paul Metzger (URSIDOC), Rémy Mullot (L3I), Vincent Quint (INRIA), Jean-Michel Salaün (URSIDOC), Bernard Victorri (LATTICE), Georges Vignaux (LCP)
Mais aussi les membre du bureau en 2005 :
Abdel Belaïd (LORIA),Bruno Bachimont (INA), Dominique Boullier (UTC), Jean Charlet (AP-HP),Catherine Garbay (IMAG), Andréa Iacovella (CENS) , Yves Jeanneret (CELSA) Jean-Marc Ogier (L3I), Jean-Michel Salaün (URSIDOC), Florence Sèdes (IRIT).
Problématiques
Qu'est-ce qu'un document ?
Comme l'indique le titre de l'ouvrage parut quatre ans après les débuts de ce groupe de réflexion, Roger T. Pédauque souhaite analyser “le document à la lumière du numérique”. C'est à dire d'une part mieux définir la notion de “document”, que ce soit un document traditionnel ou numérique, aux vues des questions mises en exergues par sa numérisation. La numérisation est utilisée comme un révélateur. Mais d'autre part, c'est aussi analyser comment cette numérisation transforme la notion de “document”. Qu'est-ce qui fait la spécificité d'un document numérique, quelles transformations pourrait-il encore connaître ?
Pour réaliser cette recherche, Roger T. Pédauque a, dès le début, souhaiter mobiliser des disciplines hétérogènes pour croiser les angles d'analyse et développer une conception riche. En effet il part du constat que rares sont les disciplines qui ont travaillé frontalement cette notion. Parmi celles-ci, il cite les Sciences de l'Information et d'autres disciplines qui travaillent sur les techniques de numérisation des documents traditionnels ou sur la production de document spécifiquement numériques. Mais sinon, bien que l'ensemble des disciplines en sciences sociales travaillent cette notion, comme l'histoire et la sociologie, aucune ne la travaille directement. Roger trouve qu'elles ne la travaillent que “sous un angle instrumental”, c'est à dire à la fois sous des formes qui sont des cas particulier et pour les besoins, éventuellement épistémologiques, de la discipline concernée.
Pour analyser la notion de document, Trois “entrées” sont retenues : objet, signe, medium. D'une part, elles sont utilisées comme des angles d'analyses privilégiés, l'un après l'autre et chacune par des disciplines distinctes, afin de dégager trois définitions partielles. Mais ces approches restent toujours combinées, ainsi lorsque l'une est privilégiée, cela ne veut pas dire que les autres ne sont pas en même temps mobilisées, elles sont juste minorées. D'autres part ces trois entrées sont considérées comme des dimensions et des fonctions constitutives du document. On peut prendre comme analogie un cône qui selon l'angle de vue peut apparaître comme un triangle, un disque ou une multitude de forme intermédiaires.
Le document comme objet
Le document traditionnel, comme le codex, est assez facilement assimilable à un objet matériel. Cependant, selon Roger T. Pédauque, cette qualité d'objet ne se résume pas à sa matérialité (codex fait de papier, disque laser, bande magnétique, etc.), elle doit aussi être comprise comme une forme repérable (caractères typographique, mise en page, images animées ou pas) par ses caractéristiques extérieures et modelée par une structure interne. Cette forme identifié induit déjà un certain “contrat de lecture” entre l'auteur et le lecteur. À cette dimension sont associé des problèmes de stockage, d'adressage, de formats de lectures etc..
Partant de là Roger propose un premier ensemble de définition du document. Il définit le document traditionnel comme un support plus des inscriptions qui ne nécessitent pas de “dispositif de lecture”, bien qu'il nécessite une culture particulière pour le lire. Puis il définit le “document analogique” comme un document traditionnel qui, en plus, nécessite un dispositif de lecture, un appareil, qui restitue le document pour qu'il soit consulté. Enfin le document numérique renforce la dépendance à un dispositif de lecture, la suite de 1 et de 0 ne peut pas être interprété sans lui, mais ce dispositif est plus diffus car composé de multiples appareils (câbles, ordinateurs, écrans, etc.). Avec la numérisation du document, Roger Pédauque considère que l'importance est déporté sur la structure logique du document, ce qui permet de calculer une restitution, et sur les données - ainsi la dimension matérielle passe au second plan.
Une première définition du “document numérique” est énoncé selon cet angle d'analyse :
Un document numérique est un ensemble de données organisées selon une structure stable associée à des règles de mise en forme permettant une lisibilité partagée en son concepteur et ses lecteurs. [Pédauque 2003]
Le document comme signe
Pour Roger T. Pédauque aucun sens ne peut être déduis d'un objet hors d'un contexte de production et d'interprétation, c'est en cela que le document participe à la création de sens. D'une part en permettant l'existence des signes (habituellement réduits à du “contenu”) dans un contexte. D'autre part en apportant des éléments de contextualisation nécessaire à l'interprétation de ces signes. Connaître l'auteur d'un signe, sa date de production, l'éditeur, la collection, etc. permet de donner du sens ou de l'enrichir. Ainsi selon cette approche le document est définie comme l'association entre une inscription et un sens. La numérisation du document a permit d'affiner cette mise en contexte, cela transforme donc sa définition : il devient une association entre un “texte informé”, car il est plus facile d'isoler des unité d'information (par exemple les lettres et autre signes documentés par Unicode), et des “connaissances” qui permettent des les interpréter.
Une deuxième définition du “document numérique” est énoncée :
Un document numérique est un texte dont les éléments sont potentiellement analysables par un système de connaissance en vue de son exploitation par un lecteur compétent. [Pédauque 2003]
Le document comme medium
Selon cette approche, le document est vu comme “un élément tangible d'une communication entre des personnes humaines”. Ainsi le document rend compte de relations sociales, mais il permet aussi l'existence de certaines relations sociales, il les modèle. Inversement les sociétés modèlent le document et le font exister selon certaines manières. Il lie le développement des documents depuis environ 300 ans au développement de la modernité et des activités qui la caractérise (état moderne, industrialisation, science moderne, loisirs).
Roger T. Pédauque considère qu'un document, pour exister en tant que tel, ne peut pas être intime. il doit être reconnu par d'autres personnes que l'auteur comme un document - ce qui ne veut pas dire qu'un document est forcément public. Cette reconnaissance sociale lui permet d'acquérir une certaine légitimité. Tout signe n'est pas un document. Ainsi un carnet intime ne peut pas être considérer comme un document, mais si un jour il est publié, alors il devient un document. Cette condition de “reconnaissance” permet aussi de comprendre ce qu'est un document par attribution.
Selon Pédauque, il faut encore ajouter un condition pour qu'un signe légitime soit considéré comme un document : il ne doit pas être éphémère. Ainsi une émission de télévision ou de radio ne peut être considéré comme un document, seul son enregistrement lui donne le statut de document. Ainsi le document traditionnel est est composé d'une inscription et d'une légitimité.
Le numérique est vu comme une source majeure de transformation de “l'ordre documentaire”, les société s'informatisent rapidement et massivement. L'informatique augmente la place des procédures administratives dans le quotidien des populations, la multiplication des fichiers et des possibilités de croisement permet d’accroître les capacités de contrôle. Par ailleurs là où le filtrage des documents s'effectuait principalement en amont de la publication, maintenant elle se fait beaucoup en aval.
Une troisième définition du “document numérique” est énoncée :
Un document numérique est la trace de relations sociales reconstruites par les dispositifs informatiques [Pédauque 2003]
La re-documentarisation du monde
L'ensemble des activités de numérisation des documents et des transformations générées elles est appelée “redocumentarisation du monde”. La documentarisation est définie comme le traitement d'un document. Dans un premier temps la numérisation entraîne une re-documentarisation car les documents pré-existants, les documents traditionnels, vont être transposés en documents numériques. Puis dans un deuxième temps re-documentarisé consiste à enrichir ces documents des métadonnées nécessaires à la reconstruction et à la traçabilité de ces documents.
Bibliographie
Articles
- PÉDAUQUE Roger T. Document : forme, signe et relation, les re-formulations du numérique. 2003
Disponible sur : http://archivesic.ccsd.cnrs.fr/sic_00000511
- PÉDAUQUE Roger T. Le texte en jeu Permanence et transformations du document. 2005
Disponible sur : http://archivesic.ccsd.cnrs.fr/sic_00001401
- PÉDAUQUE Roger T. Document et modernités : Version finale dite ”Pédauque 3”. 2006
Disponible sur : http://archivesic.ccsd.cnrs.fr/sic_00001741
Monographies
- PÉDAUQUE Roger T. Le document à la lumière du numérique : Forme, texte, médium : comprendre le rôle du document numérique dans l'émergence d'une nouvelle modernité. Caen : C&F Éditions, 2006, 224 pages. cfeditions.com
- PÉDAUQUE Roger T. La Redocumentarisation du Monde. Toulouse : Éditions Cépaduès, 2007, 213 pages. cepadues.com
Disponible surblogues.ebsi.umontreal.ca
Disponible surblogues.ebsi.umontreal.ca
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